INTERVENTION D’ANCIELA AUX RENCONTRES DE L’ENGAGEMENT

Des Rencontres de l’Engagement ont eu lieu le 17 mai 2014 à Lyon afin de permettre à toutes les personnes intéressées d’échanger sur la diversité des engagements, sur leurs ressorts et sur comment les citoyens interpellent la démocratie locale et l’action publique.

La journée, initiée par le Conseil de Développement du Grand Lyon, était le résultat de six mois d’échanges et de co-construction entre les membres du CdD et un groupe d’associations et d’acteurs de la société civile (Afev  – Anciela – ATD Quart Monde – Colibris –Dialogues en Humanité – Jeune Chambre Économique – Locaux Motiv’ – Mission Lyon La Duchère –Pacte Civique – Petits frères des Pauvres – Petits pas pour l’Homme – Tisseurs de Liens, ThéâtreDésirée – Ucil – UnisCité).

Ces rencontres ont permis à Anciela de présenter quelques pistes de réflexion et d’analyse tirées du projet de recherche sur l’engagement citoyen menée en 2013-2014.

Intervention d’Anciela lors de la plénière des Rencontres de l’Engagement

Peux-tu nous présenter rapidement Anciela ?

Anciela est une association engagée en soutien d’une citoyenneté active face aux enjeux écologiques. L’association mène des projets pour permettre aux citoyens de réfléchir à des projets collectifs ou des mesures publiques à mettre en place pour une société plus écologique et solidaire. Anciela accompagne ensuite les citoyens dans leurs envies d’agir et dans la réalisation de leurs projets.

Afin d’être plus pertinente dans ses actions, Anciela a créé un pôle recherche qui réfléchit aux dispositifs participatifs, à l’engagement et à la participation des citoyens et à la question du pouvoir d’agir.

Peux-tu nous présenter dans quel cadre s’inscrit votre recherche sur l’engagement et quels étaient ses objectifs ?

L’étude menée par Anciela avait pour objectif de comprendre comment se construisent les parcours d’engagement afin de mieux accompagner les citoyens dans leurs projets et leurs envies d’agir. Pour cela, nous avons rencontré 74 citoyens engagés dans le champ de la transition écologique, de la solidarité ou des alternatives sociales. Nous avons évoqué leurs engagements, leurs déclics, leurs motivations, leurs stimuli, leur rapport au politique et aux institutions. Les quatre personnes présentes dans les vidéos faisaient partie d’entre eux.

Ces quatre personnes ont des parcours et des engagements différents les unes des autres. Peux-tu nous en dire plus sur les différentes formes d’engagement que vous avez rencontré ?

Les engagements citoyens ont pour point commun de participer à la construction de la société en portant des valeurs ou en réalisant des projets. Après, c’est vrai qu’il est possible d’observer une grande diversité dans les formes d’engagements. Certains engagements se font dans la sphère publique (associations, partis politiques, mouvements informels, syndicat, conseil de développement…). D’autres se font dans la sphère privée : on peut penser par exemple aux débats lors de repas de famille. Certains engagements sont ponctuels, lors d’événements, d’autres se font sur le long terme. Ils correspondent à des rapports différents avec le groupe.

Ces différents engagements représentent dans tous les cas une prise de risque pour le citoyen. Il se soumet en effet au regard et au jugement des autres.

On note par ailleurs que les engagements ne sont pas les mêmes en fonction des temps de la vie. Ils varient en fonction de la disponibilité des citoyens, très variable en fonction de leurs vies professionnelle et familiale. Il est donc vraiment difficile de distinguer les citoyens engagés et les citoyens non engagés.

Est-ce que tu peux nous donner quelques exemples de grandes trajectoires d’engagement :

Il y a beaucoup mais il est possible d’en évoquer quelques-unes :

Certaines personnes déclinent les mêmes valeurs au sein de différents engagements. Par exemple, des citoyens sont engagés au Parti Socialiste et à la CFDT.

Beaucoup de mouvements informels sont influencés par des initiatives issues de pays anglo-saxons. Ils ont pour point commun d’être flexibles et de chercher une réappropriation de l’espace public.

On observe beaucoup de grappes d’engagement au sein desquelles l’engagement appelle l’engagement :

– En fonction d’un intérêt : citoyens qui sont impliqués dans plusieurs initiatives sur le même sujet.

– Pour servir un intérêt principal : je décide de siéger dans un réseau pour promouvoir les valeurs de mon association.

– Par des processus de cooptation : quand quelqu’un est reconnu dans un premier engagement, on lui propose de prendre des responsabilités ailleurs.

Il existe également des créateurs et des porteurs d’initiatives qui ont plutôt fait le choix de créer et de porter des projets autour desquels s’agrègent des individus intéressés par ceux-ci.

Enfin, certaines personnes se décrivent comme des professionnels engagés.

Et est-ce que ces différentes formes d’engagement correspondent à des motivations différentes ?

Non, c’est intéressant de remarquer qu’il existe un socle commun de motivations. La grande majorité des personnes rencontrées disent vouloir changer la société et se mettre en cohérence avec leurs valeurs.

Après, certaines motivations sont propres à des formes d’engagement : les bénévoles d’association insistent sur leur envie de se rendre utiles, les militants des partis sur la défense de principes et les membres de collectifs informels sur l’importance des affinités relationnelles.

Et comment se construisent les parcours d’engagement ?

On se rend compte que des déclics communs à beaucoup de citoyens existent, certains cognitifs et d’autres émotionnels.

L’expérience de l’altérité est importante. Par exemple, les voyages à l’étranger conduisent les citoyens à se rendre compte que des modes de pensées et d’actions différents sont possibles. Cela les conduit à repenser leur rôle dans la société.

L’expérience du collectif est aussi déterminante. Beaucoup de citoyens racontent leurs expériences des mouvements sociaux lycéens et étudiants.

Les ruptures de vie (ruptures sentimentales, déménagement, retraite) sont aussi propices à l’engagement. Elles amènent en effet les individus à faire le bilan de leur vie et à questionner leur quotidien.

Ensuite, l’enjeu des personnes ayant eu un déclic est de trouver un cadre dans lequel d’engager. L’intégration se révèle souvent difficile.

Quelles sont les autres difficultés que rencontrent les personnes engagées ?

Nous avons pu nous rendre compte que les difficultés renvoient à des enjeux qui sont également des leviers d’engagement.

Beaucoup de citoyens parlent du manque de reconnaissance de l’engagement, à la fois de la part du groupe au sein duquel ils sont engagés et de la part du reste de la société. A contrario, la valorisation des initiatives citoyennes pourrait être un levier.

Les difficultés relationnelles sont très évoquées. Comment organiser le groupe ? Comment prendre des décisions ensemble ? En même temps, les citoyens expliquent que les relations humaines sont ce qui leur permet de tenir dans leur engagement.

Le manque de connaissances et de savoirs est une autre difficulté. Les citoyens sont peu accompagnés dans la réalisation de leur engagement. Il n’y a pas beaucoup d’associations ou de collectifs qui permettent un partage des savoirs.

Malgré tout, les citoyens apprennent beaucoup de l’engagement. On se rend compte qu’à travers leur engagement, les citoyens développent leur pouvoir d’agir. L’engagement appelle l’engagement.

Pour finir, quel rapport les citoyens entretiennent au politique et à l’action publique ?

Il y a des différences en fonction des formes d’engagement.

Les bénévoles d’associations ont pour la plupart une vision plutôt positive des collectivités territoriales avec lesquelles ils travaillent. Par contre, ils se révèlent assez méfiants vis-à-vis des partis politiques. Ils disent vouloir faire de la politique autrement. Les bénévoles qui sont aussi militants dans des partis politiques expliquent ce choix par leur conviction que le changement ne viendra que par la politique.

Les membres de mouvements plus informels se développent pour beaucoup en parallèle des institutions. Ils sont les plus critiques de l’action publique et de la politique.

De manière générale, les bénévoles d’association et les citoyens engagés dans les collectifs informels se distinguent des militants des partis politiques par leur vision du rôle des citoyens. Pour eux, l’innovation vient des citoyens. Les institutions publiques et les élus devraient être à leur écoute et les soutenir. Pour la plupart des militants des partis politiques rencontrés, les élus détiennent le pouvoir et peuvent le déléguer aux citoyens.

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